Yoga pour le corps subtil : introduction aux marma

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Depuis plusieurs années, nous pratiquons avec notre enseignant Cyrus Fay le Varma Yoga, un Yoga où les souffles vitaux et la circulation de l’énergie dans les postures occupent une place fondamentale. La conscience des points marma (ou varma comme ils sont appelés dans le Tamil Nadu) constitue un élément essentiel de cette méthode.

Mais que sont donc les points marma ?

Ce sont des points vitaux dont la connaissance et la science restent encore peu répandues. Dans les arts de combat comme le Kalaripayatt, le guerrier peut tuer ou neutraliser son adversaire en touchant ou blessant certains points marma. C’est d’ailleurs dans ce contexte qu’ils sont cités dans le Rig veda et l’Atharva veda

Les points marma sont des points de rencontre entre les différentes structures du corps ainsi qu’entre les dosha et les guna. Ils sont dotés d’une intelligence propre et agissent comme des interrupteurs pour le flux du Prana. Dans le Kalaripayatt on en dénombre 365, dans l’Ayurveda et la médecine Siddha 107, leur taille varie de ½ à 4 anguli (largeur de doigts).

Exemple de représentation des principaux points marma

Décrits en détails par Sushruta, ils possèdent une pulsation particulière et permettent d’équilibrer dosha et sous dosha et de traiter un certain nombre de maladies. Ils sont classés par rapport à leur potentiel de « fatalité », à leur localisation et à leur lien aux éléments. Chaque point marma est lié à un dosha, un vayu, un dhatu, à des organes et aux srota. Les marma sont aussi associés aux nadi et ils permettent de calibrer le flux de Prana qui y circule.

Pour approfondir ces aspects thérapeutiques, plusieurs ouvrages modernes sont disponibles comme « Ayurveda et Marmathérapie » de David Frawley ou « Marma points of Ayurveda » de Vasant Lad. Ce dernier met à disposition sur son site Web plusieurs vidéos d’introduction aux marma ainsi qu’au massage du visage.

Marma chikitsa (utilisation thérapeutique)

Fascinée par les marma depuis plusieurs années, j’ai pu constater leur impressionante efficacité thérapeutique. Mais si leurs utilisations en chikitsa (thérapie) et dans les arts de combat sont plutôt connues, leur utilisation dans la pratique du Hatha yoga l’est beaucoup moins et n’est quasiment pas documentée. C’est ce dernier point qui a occupé une bonne partie de notre temps dans le cadre de l’Institut Français de Varma Yoga et de notre pratique quotidienne.
Après trois ans de pratique, ce que nous pouvons dire c’est qu’ils sont pour nous le chainon manquant entre le corps physique et le corps subtil, des portails de multi-dimensionnalité comme les décrit Vasant Lad et peut être la manière la plus accessible de percevoir plus concrètement le corps subtil et le Prana.

Pratiquer avec les marma

En prenant conscience des marma, on se rend compte que les postures de Hatha Yoga, lorsque le bon alignement est installé, agissent sur ces points et améliorent la circulation de l’énergie.

C’est peut-être en partie pour cela que les pratiques de Yoga authentiques, qui donnent beaucoup d’importance à l’alignement (tout comme le Yoga Iyengar), ont un potentiel thérapeutique et énergisant intrinsèque. Que ceux qui ne veulent pas s’embêter avec des fiches anatomiques se rassurent, il suffit de pratiquer avec le bon alignement et la bonne intériorisation pour agir sur les points marma et améliorer la circulation du Prana. Vasant Lad cite d’ailleurs dans l’ouvrage mentionné plus haut, les points marma qui sont activés et stimulés par différentes postures pour une pratique thérapeutique.

Marma activés par les postures (source : Vasant Lad)

Cette circulation de l’énergie peut aussi être conscientisée par une concentration sur les points marma pendant l’asana. Dans chaque asana, il existe des points marma « secondaires » qu’on doit activer ou décontracter pour ne pas bloquer ou dévier l’énergie. Et il y a les points marma principaux sur lesquels on va se concentrer pour établir le circuit énergétique.

Par exemple, dans la posture du demi pont ou Setu Bandhasana, en activant les marma des pieds et des jambes à partir de Talahridaya marma ainsi que ceux des épaules et en poussant vers le haut à partir de Urvi marma (dans les cuisses), on peut sentir l’énergie circuler entre le marma de l’anus et celui du bas de la gorge, liés aux chakra Muladhara et Vishuddhi, faisant ainsi le « pont » entre ces deux centres énergétiques en passant par le marma du nombril nabhi.

Cette même méthodologie peut être appliquée aux techniques de nettoyage ou aux techniques de Pranayama.

Ici encore, chacun devra se faire sa propre expérience et accéder à son propre ressenti. En ce qui nous concerne, cette manière de pratiquer nous a amené à une expérience plus subtile et plus intérieure et l’impression d’accéder véritablement à Pratyahara et de mieux percevoir la circulation du Prana.

Le texte yogique classique Vasishta Samhita contient une section importante expliquant l’utilisation de dix-huit points marma spécifiques pour la pratique du Pratyahara.

« Les grands yogis louent toujours Pratyahara comme concentration (Dharana) dans les dix-huit lieux marma de Prana. On dit que faire circuler le Prana de chacun de ces endroits est la meilleure forme de Pratyahara. »

Vasishta Samhita

Le texte mentionne ensuite dix-huit de ces marma et leurs emplacements. La traduction anglaise de ce texte est disponible sur le site Web de David Frawley où il parle aussi de l’utilisation de mantra pour énergiser ou nettoyer les points marma. D’autres pratiques existent selon les lignées et les traditions.

Nous espérons continuer au fil des enseignements et des rencontres à approfondir notre connaissance des marma pour une pratique plus subtile et aussi plus libératrice et nous espérons aussi que cet article vous aura donné envie d’en savoir plus et d’expérimenter ce genre de pratiques si ce n’est pas déjà le cas.

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