Techniques du Pranayama

Temps de lecture : 16 minutes

Cette deuxième partie de notre exploration du l’univers du Pranayama, après avoir rappelé quels en sont les objectifs, est consacré au procédé et aux différentes  techniques qu’elles soient classiques ou sous forme de variantes (par exemples issues du Kundalini Yoga ou de la tradition Siddha).

Objectifs du Pranayama

Comme précisé dans l’introduction de notre série d’articles, le mot Pranayama peut être décomposé de deux manières.

  • Prana-Yama, où Yama signifie contrôle. Cela donne contrôle du Prana et pas uniquement contrôle du souffle ou de la respiration. Il s’agit selon cet angle de vue de contrôler, retenir, canaliser l’énergie Prana Shakti. Au fur te à mesure des pratiques cela mène à l’intériorisation de sens et de soi et donc à Pratyahara.
  • Prana-Ayama, où Ayama signifie expansion. Cela donne l’expansion, l’activation, la diffusion du Prana dans le corps de manière à en augmenter la fréquence vibratoire. Cela peut également être compris comme aller vers le Prana, du Prana individuel au Prana universel, un voyage retour vers le souffle divin.

L’objectif du Pranayama est donc transformateur. Il s’agit d’éveiller le Prana pour l’étendre dans des zones du corps, du cerveau et de la personnalité et se préparer aux états de conscience visés par la méditation. Il s’agit d’éveiller la Kundalini.

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Dispersion et conservation du Prana dans le corps (source : livre « The Heart of Yoga » de TKV Desikashar)

Cela passe par le ressenti des vayu (modalités élémentaires du Prana), l’équilibre énergétique entre Ida et Pingala et la montée dans le canal central Sushumna. Cella passe également par la préparation du système nerveux à supporter et stocker des niveaux d’énergie plus importants ; par le réveil de zones endormies du cerveau; et par la régulation du souffle et son unification avec le mental. Cela passe enfin par le cheminement du Prana à travers les différents kosha (cf. articles sur le sujet) jusqu’à atteindre l’illumination.

Au final, avant d’être un ensemble de techniques, le Pranayama vise un état. Un état où corps physique et énergétique sont alignés avec la conscience. La connexion de l’esprit et du souffle n’est pas une distraction mais un retrait à l’intérieur de soi.

Procédé du Pranayama

Approche graduelle

La règle d’or du Pranayama est de procéder régulièrement, patiemment et par étapes. Les techniques engendrent des effets énergétiques et subtils importants qu’il faut intégrer de manière graduelle. C’est pour cette raison que la pratique du Pranayama a longtemps été réservée à l’enseignement direct et personnalisé entre maître et disciple. Ne pas bruler les étapes car le risque est de bruler son système nerveux et d’endommager sa santé. Les effets ne sont pas uniquement physiques et peuvent faire ressurgir  et amplifie des émotions et des schémas de pensée refoulés, parfois depuis des vies antérieures (samskara). A quoi bon remettre en cause, pas impatience égotique, un procédé éprouvé par des milliers d’années et d’innombrables pratiquants ?

La pratique des différentes techniques évolue au fur et à mesure de l’avancée dans la Sadhana :

  • prise de conscience du Prana dans le corps : le pratiquant explore et découvre l’intériorité du souffle ;
  • contrôle du souffle (Prana-Yama) : rééducation de la respiration et de sa direction dans le corps ; découverte du lien entre respiration, corps physique et mental ;
  • expansion du Prana (Prana-Ayama) : prise de conscience des liens subtils entre le Prana, le corps, le cerveau et les cellules ; activation et fusion des vayu dans le corps.

Les vayu et leur métabolisme sont détaillés dans notre série d’articles sur les pratiques subtiles du Yoga. En synthèse, l’objectif du travail subtil est d’inverser les mouvements naturels de Prana vayu et Apana vayu en arrêtant la dynamique d’alternance électrique Ida/Pingala. Il s’agit ensuite de prendre conscience de la dynamique magnétique entre Samana vayu et Vyana vayu. La dernière étape est l’union des vayu dans le plexus solaire avec Udana vayu qui active la force ascensionnelle de la Shakti dans le canal central Sushumna.

Alternance des narines (Anuloma Viloma)

Une technique importante que l’on retrouve dans plusieurs pratiques et celle d’alterner le souffle entre les narines.

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La narine droite est solaire et liée à Pingala nadi et à Prana vayu. La gauche est lunaire et liée à Ida nadi et à Apana vayu. Les narines sont également en lien avec le système nerveux autonome : la droite avec le système sympathique (en charge de la réponse aux situation de stress) et la gauche avec le système parasympathique (en charge des activités relaxantes).

La respiration alternée entre les narines permet d’équilibrer ces différents aspects : solaire/lunaire, Prana/Apana, sympathique/parasympathique. A l’inverse certaines pratiques se concentrent sur une seule narine pour renforcer un des deux aspects.

L’exercice de respiration alternée est appelé Anuloma Viloma (qui signifie « dans le sens du poil, à rebrousse poil ») . Il est parfois confondu avec une technique de Pranayama nommée Nadi Shodhana et peut être appelé dans ce cas Anuloma Viloma Pranayama. La différence entre ces deux pratiques est la même que celle entre les exercices de respiration et de Pranayama : la rétention de souffle.

Rétention (Kumbhaka)

Les rétentions jouent un rôle très important dans le Pranayama. Certains textes classiques, comme les Yoga Sutras de Patanjali, affirment même qu’il n’y a pas de Pranayama sans kumbhaka et utilisent les deux mots de manière interchangeable. Les autres techniques ne sont que des exercices pour préparer ou induire les rétentions.

Il existe trois type de rétentions :

  • Antar Kumbhaka : rétention interne, à poumons pleins après l’inspiration ;
  • Bahir Kumbhaka : rétention externe, à poumons vides après l’expiration ;
  • Kevala Kumbhaka : rétention au-delà de la dualité, qui apparaît de manière spontanée et qui mène vers l’état de Samadhi.
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(Photo : diving-info.com)

L’expiration ou l’inspiration qui suit une rétention doit être lente et fluide. Vous ne pouvez contrôler ce point cela signifie que la rétention était trop longue. Encore une fois : la pratique doit être douce et il ne faut pas forcer l’exercice pour éviter d’endommager le corps. Si vous ne tenez pas très longtemps en rétention ce n’est absolument pas un problème, les exercices de Pranayama sont graduelles et votre capacité de rétention augmentera naturellement avec la pratique.

Au niveau physiologique, la rétention augmente le taux de dioxyde de carbone qui est alors stocké dans le cerveau. Cela a pour effet de dilater les vaisseaux sanguin du cerveau et de me l’irriguer. La réserve de dioxyde de carbone permet une meilleure extraction de l’oxygène lors de la respiration.

La rétention synchronise également les système respiratoire te neuronaux et permet de synchroniser le corps, la respiration et l’esprit. Sundar Balasubramanian, enseignant de Pranayama mais également chercheur en biochimie affirme que l’inspiration suivant une rétention génère un afflux de salive contenant des concentrations différentes de la normale pour 22 protéines. Il prouve ainsi que le Pranayama, par la production de salive, modifie le profil biochimique du corps humain. Nous vous conseillons la lecture de ses deux livres « PranaScience » (qui donne des détails sur ces aspects tout ne lien cela à la tradition Siddha dont est issue le chercheur) et « Mind your Breathing » (ouvrage plus pratique qui détaille 37 techniques de Pranayama).

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Au niveau énergétique, la rétention inverse le flux montant de Prana vayu et le flux descendant d’Apana vayu. La pompe Prana/Apana arrêtée, ces deux vayu fusionnent dans le 3ème chakra Manipura. Cela permet de mieux sentir la deuxième pompe entre le mouvement centripète de Samana vayu et celui centrifuge de Vyana vayu. L’arrêt de cette deuxième pompe entraine la fusion des quatre premier vayu avec Udana, le cinquième . Cette réunification des vayu déclenche alors la montée de la Kundalini.

Les techniques de rétention devraient idéalement être encadrées par un enseignant expérimenté pour éviter tout problème. Elles sont évoquées ici à titre indicatif et doivent dans tous les cas être pratiquée de manière douce et graduelle. En cas de sensation de gêne physique, reprendre plusieurs respirations normales et profondes. Les personnes avec des problèmes cardiaques ou d’hypertension doivent impérativement être accompagnées.

Voici un enchaînement d’exercices possibles, proposé par Swami Niranjanananda dans son livre « Yoga Darshan » pour s’entraîner à la rétention :

  • rétentions internes :
    • commencez par des rétentions au niveau de la cage thoracique, en relâchant le diaphragme et l’abdomen puis expirez lentement en rentrant très légèrement l’abdomen ;
    • une fois ce premier exercice bien maîtrisé, procédez à des rétention abdominales en concentrant le souffle au niveau du nombril et en détendant la poitrine puis expirez lentement en rentrant très légèrement l’abdomen ;
    • les deux premiers exercices maîtrisés, réalisez des rétentions à la fois thoraciques et abdominales en égalisant la pression entre le thorax et l’abdomen, puis expirez lentement en rentrant très légèrement l’abdomen ;
  • rétentions externes :
    • ne passez à ces exercices qu’une fois que vous êtes à l’aise avec les rétention internes car les rétentions externes sont plus difficiles ;
    • inspirez puis expirez normalement puis retenez votre respiration (il reste de l’air dans vos poumons), relâchez la zone du diaphragme et de l’estomac, puis inspirez profondément lorsque le besoin s’en fait ressentir sans attendre d’être mal à l’aise ;
    • une fois l’exercice précédent bien maîtrisé, expirez profondément de manière à vider au maximum les poumons, l’effet de vide attire naturellement l’abdomen vers l’intérieur créant ainsi un Uddiyana bandha spontané, puis inspirez profondément.

Pendant ces exercices, restez à l’écoute de votre ressenti, observez les zones où l’énergie est activée (zone du cœur en rétention externe et du nombril en rétention interne), développez la proprioception et la conscience subtile d votre corps.

Il est important d’intégrer petit à petit le fait que les rétentions ne doivent pas être des blocages ou des ligatures du souffle. Elles en sont des extensions subtiles, comme si l’inspiration ou l’expiration continuaient dans un autre plan. Vous pouvez pour ressentir cela continuer à ouvrir légèrement la cage après l’inspiration, sans inspirer d’air. De même après l’expiration continuez à détendre le ventre et le plancher pelvien.

Il est parfois conseillé de prendre une petite inspiration supplémentaire avant d’exprimer, et une petite expiration avant d’inspirer. A vous de voir ce qui vous convient le mieux et vous permet d’être le plus à l’aise possible.

Éléments de progression

Tous les exercices de pranayama sont des combinaisons particulière d’inspiration (puraka), d’expiration (rechaka) et de rétention (antar ou bahir kumbhaka). Cela induit une grande variabilité dans les pratiques et permet deux choses :

  • la graduation progressive des techniques  ;
  • l’adaptation des exercices aux cas particulier de chaque pratiquant, selon le procédé cher à Krishnamacharya (se reporter à un autre article pour plus de détails sur ce maître incontournable et son enseignement).

Dans le premier article de cette série, nous avons fait varier le ratio entre l’inspiration (puraka) et l’expiration (rechaka) : d’abord un rythme de 1:1 puis de 1:2. Avant de s’adonner aux pratiques de Pranayama il convient de s’exercer également en ajoutant les phases de rétention. La notation des rythmes est de ce type Inspiration : rétention interne : expiration: rétention externe. Par exemple 1:1:1:1 signifie que les quatre phases ont les mêmes durées.

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Livres de Swami Niranjanananda qui détaillent les techniques de Pranayama

Les exercices suivants, proposés par Swami Niranjanananda dans son Livre « Prana and Pranayama« , vous permettent d’intégrer progressivement les rétention de le continuum des respirations :

  • commencez par ajouter des rétentions internes avec le ratio 1:1:1 ;
  • une fois que vous êtes bien à l’aise passez au ration 1:1:2, toujours sans rétention externe, puis 1:2:2 ;
  • lorsque les rétentions internes sont bien intégrés, ajouter des rétentions externes selon le ration 1:1:1:1, ceci correspond à la respiration équilibrée  ou carrée et vous êtes déjà dans un exercice de Pranayama (Samavritti Pranayama) !
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Pranayama
1:1:1:1
  • les autres rythmes classiques du Pranayama sont les suivants :
    • 1:1:2:1
    • 1:2:2:1
    • 1:4:2:1
    • 1:4:2:2

La notion de « à l’aise » peut être subjective. Une indication est de pouvoir faire l’exercice 21 fois de suite sans être essoufflé ni fatigué  et en restant complétement détendu. Ne brûlez pas les étapes, ne vous brûlez pas.

L’autre axe de progression dans ces exercice est la durée des différentes phases ou si vous voulez la valeur de la mesure 1 dans les différents rythmes.  Traditionnellement la durée des Pranayama est calculée en matra qui est le temps nécessaire à faire le tour du genou avec l’index et de claquer ensuite des doigts. Sa durée dépend de chacun et varie généralement entre 1s25 et 1s50.

Tout en conservant les ratios, augmentez progressivement la durée de base des rythmes.  Par exemple passez de 1:1:1 à 2:2:2 puis à 4:4:4. Ou encore de 1:4:2:1 à 3:12:6:3 puis 6:24:12:6. Les ratios sont à augmenter sur la base d’une semaine ou d’un mois en fonction de la régularité et de l’avancée de votre pratique.

Mais alors jusqu’à quelle durée aller ? Cela va dépendre des instruction de votre maître que cela soit un enseignant expérimenté ou votre maître intérieur drapé du bon sens et guidé par l’intuition. Sur ce sujet les textes classiques du Hatha Yoga évoquent les rythmes suivants sur la base du ratio 1:4:2 nommé Visamavritti :

  • petit Pranayama : 8:32:16
  • Pranayama moyen : 16:64:32
  • grand Pranayama : 32:128:64
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Çamavr,tf, 1:1:1:1
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Nous sommes là sur des rythmes avancés que l’on ne peut obtenir qu’après des années de pratique pour pouvoir les tenir en restant dans un profond état de paix intérieure. Inutile donc de viser trop haut trop vite. Inutile d’attendre d’avoir atteint le grand Pranayama ni même le petit pour commencer les pratiques. La graduation se fera au fur et à mesure, dans les pratiques elles-mêmes.

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Des mantra peuvent également être utilisés pour mesurer les temps des différentes phases, comme par exemple :

  • Om : 1 syllabe ;
  • Om Namah Shivaya : 8 syllabes (l’avant-dernier a est long) ;
  • le mantra Surya Gayatri : 24 syllabes.

Bien sur le même mantra peut être répété plusieurs fois sur chaque phase. Vous pouvez vous reporter à notre série d’articles sur les mantra pour explorer cet univers.

Techniques de Pranayama

Passons désormais aux techniques de Pranayama à proprement parler. Elles sont généralement classées en trois catégories :

  • techniques équilibrantes : équilibre le souffle et le flux entre les nadi Ida et Pingala ;
  • techniques dynamisantes (ou chauffantes) : créent de la chaleur dans les corps physique et subtil ;
  • techniques calmantes (ou rafraîchissantes) : apaisent le corps et le mental, développent la conscience subtile du flux de Prana.

Techniques équilibrantes

Nadi Shodhana

Après les exercices respiratoires tels que ceux abordés ci-dessus, Nadi Shodhana est le premier exercice de Pranayama à réaliser et à maîtrise. Il prépare aux exercices suivants tout en restant également un exercice à pratiquer de manière régulière car il est considéré comme un des moyens d’atteinte la rétention spontanée (Kevala Kumbhaka). C’est un exercice de purification et d’équilibre des Nadi Ida et Pingala, il équilibre également le du corps physique et le mental.

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Nadi Shodhana est une pratique très importante, à pratiquer régulièrement. S’il vous fallait n’en conserver qu’une ce serait celle-ci. Prenez le temps nécessaire pour bien la maîtriser, en procédant par étapes comme par exemple indiqué sur la carte YogĀrkana. Notez que cela peut prendre de plusieurs mois à une année. 

Les trois bandha principaux peuvent être ajoutés pendant les phases de rétention (se reporter à l’article sur les mudra internes pour plus de détails sur les bandha). A un certain stade la pratique peut entraîner transpiration et tremblements, signes que la Kundalini commence à s’éveiller.

Dans son ouvrage « Pranayama Dipika – Lumière sur le Pranayama« , B.K.S. Iyengar détaille précisément ce qu’il nomme le Pranayama digital, c’est-à-sire l’art subtil de de réguler le souffle dans les narines à l’aides des doigts. Pour ce faire, il préconise de toujours garder les doigts (pouce à droite, annulaire et auriculaire à gauche) en contact avec les narines, même avec celle qui n’est pas complètement bloquée. Il recommande également d’utiliser Vishnu mudra plutôt que Nasagra mudra.

Texte de remplacement généré par une machine : Viçhnu mudra
Naçacjra murlra

La pratique devient subtile et similaire à jouer d’un instrument de musique. Avec l’habitude, la pratique peut également être réalisée sans l’aide de la main, juste par action du mental.

Thirumular Pranayama

Cette technique provient de la tradition des Siddha du Sud de l’Inde. Elle est détaillée par Sundar Balasubramanian à partir de du l’ancien texte tamoul Thirumanthiram écrit par le saint Thirumular.

La narine bloquée par la main droite est celle qui est la moins active au moment de la pratique. En effet le cycle nasal fait alterner la respiration entre les deux narines tout au long de la journée et de la nuit. Ce mécanisme, comme depuis longtemps par le Svara Yoga, est à la base de pratiques d’équilibrage et d’alignement du souffle avec les rythmes universels.

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Dans cette technique, l’inspiration se fait toujours par la narine active et l’expiration par la narine opposée.

Techniques dynamisantes

Kapalabhati Pranayama

Il existe des débats d’experts sur le fait que cette technique soit un pranayama en tant que tel ou plutôt une technique de nettoyage. Kapalabhati est bien une technique de nettoyage préparatoire aux autres exercices de Hatha Yoga. Elle fait partie des Shatkriya au sujet desquels vous pouvez consulter un article dédié sur YogĀrkana.

Kapalabhati devient un pranayama lorsqu’on y ajoute des rétentions, des bandha et plus généralement un travail plus centré sur le corps énergétique. Au niveau physique la technique permet de purifier la tête, les sinus et le lobe frontal du cerveau. Au niveau énergétique, il s’agit d’une technique dynamisante qui agit sur les centres physiques supérieurs et prépare à la méditation.

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Lors de l’expiration, qui est la seule phase active, l’air est chassé en direction de la tête. Imaginez et visualisez la colonne d’air qui remonte et vient agit à la base du cerveau de manière répétée. Cela peut entraîner des sensations au niveau de la tête comme si elle étincelait de lumière, d’où le nom de Kapalabhati (crâne étincelant). Cela peut induire un état de flottement ou d’étourdissement, dans ce cas reprenez des respirations longues et profondes.

Les technique avancées ajoutent des phases de rétention interne puis externe à la fin de chaque cycle. C’est lors de ces phases que les bandha peuvent s’installer d’eux-mêmes, tout naturellement. Ne cherchez donc pas à les forcer mais plutôt à les laisser éclore au fur et à mesure que vous avancez dans votre pratique : plus ils sont subtils, plus ils sont puissants.

Bhastrika

Bhastrika est une autre technique dynamique de pranayama. Comme dans Kapalabhati le rythme est rapide mais avec deux différences importantes :

  • phases d’expiration et d’inspiration sont toutes deux actives et de durée égales ;
  • l’ensemble du système respiratoire te mobilisé et pas uniquement le diaphragme comme dans Kapalabhati.

L’exercice tire son nom du puissant soufflet du forgeron qui active le feu en le pompant. C’est une technique très dynamique et puissante. Il est conseillé de l’aborder une fois la technique de Kapalabhati bien maîtrisée.

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Il existe de nombreuse variantes de Bhastrika, plus ou moins dynamiques. La progression indiquée dans la carte ci-dessus ajoute progressivement la respiration alternée par les narines, la rétention interne puis la rétention externe et enfin l’ajout de bandha au fur et à mesure que l’on maîtrise la technique.

Il est également possible l’alterner inspiration et expiration entre les narines lors des dix respirations du cycle de base.

Le soufflet peut être positionné au niveau de l’abdomen (seuls le diaphragme et le ventre bougent activement, où au niveau du thorax (diaphragme et ventre ne bougent pas volontairement).

L’aspect dynamique des respiration peut être accentué par des mouvements du corps , comme par exemple :

  • tendre les bras ver le ciel à l’inspiration puis les ramener à l’expiration le long des côtes en pliant les coudes et en serrant les poings (Bhastrika thoracique) ;
  • coudes à la hauteur des épaules,  inspirer les mains ouvertes vers l’avant devant les épaules et expirer en fermant les poings et en reculant les coudes comme si on ramait ;
  • poser les mains au sol et inspirer en soulevant le menton et en arquant légèrement le dos, puis expirer en pliant les coudes et en amenant le front vers le sol et l’abdomen contre les cuisses.

Le Kundalini Yoga selon Yogi Bhajan utilise beaucoup une technique qui se situe entre Bhastrika et Kapalabhati dans ses kriya. Comme dans Bhastrika, l’expiration et l’inspiration sont de même durée. Ils sont réalisés très rythmée mais pas  de manière trop profonde pour rester rapide et léger. En revanche, comme dans Kapalabhati, seule l’expiration est active. La respiration du feu est souvent utilisée pour dynamiser les kriya. De même Bhastrika peut être utilisée dans des postures pour augmenter l’ardeur (tapas) de la pratique et favoriser la circulation de l’énergie.

Surya Bhedana

Dernière technique dynamisante présentée ici, Surya Bhedana consiste à activer Pingala nadi via des respirations similaire à Nadi Shodhana mais uniquement par la narine droite.

C’est une technique très puissante qui échauffe le corps et dynamise l’esprit. Elle doit être pratique qu’une fois Nadi Shodhana bien maîtrisé, notamment le rythme 1:4:2 et les bandha.

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La variante où l’expiration se fait par la narine gauche est une technique plus avancée de Svara Yoga, qui s’attache à équilibrer le souffle entre les narines.

Techniques calmantes

Ujjayi

Littéralement Ujjayi signifie qui est victorieux, qui libère de l’esclavage. Il s’agit d’une pratique importante du Yoga, souvent nommé respiration psychique car elle agit sur les centres physiques supérieurs.

Ujjayi est la deuxième technique de régulation du flux d’air (depuis la gorge) après celle de la respiration alternée (depuis les narines).

Une fois la technique pour produire le son océanique maîtrisée, la pratique devient plus subtile avec l’ajout de la rétention interne, des bandha puis de la visualisation des courants d’énergie dans l’axe vertébral.

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Le point à l’arrière du palais mou est important dans cette pratique car c’est la jonction entre les chakra inférieur et ceux de la tête qui ne sont plus liés aux cinq éléments. La concentration su cet espace, comme si le souffle ne provenait, est considéré dans la tradition Siddha comme un moyen progressif de connecter Sahasrara chakra.

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Krishnamacharya utilisant Vishnu mudra pour la respiration alternée

Des variantes d’Ujjayi sont transmises dans la lignée de Krishnamacharya :

  • Ujjayi Anuloma : inspirations Ujjayi par les deux narines et alternance d’expirations normales entre les deux narines ;
  • Ujjayi Viloma : expirations Ujjayi par les deux narines et alternance d’inspirations normales entre les deux narines ;
  • Ujjayi Pratiloma : expirations/inspirations normales par chaque narine intercalées entre expirations/inspirations Ujjayi par les deux narines.

La vidéo ci-dessous détaille la pratique d’Ujjayi Pratiloma ou respiration alternée inversée.

Ujjayi est souvent associé au mantra du souffle So Ham : So est répété mentalement à l’inspiration et Ham à l’expiration. Nous aborderons plus en détail la pratique combinée des techniques de Pranayama et des mantra dans le prochain article de cette série.

Bhramari

Bhramari est également une technique sonore : à l’expiration est réalisée en produisant un son semblable au bourdonnement d’une abeille.

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Cette technique favorise l’intériorisation des sens (Pratyahara), notamment lorsqu’elle est associé à Shanmukhi mudra (consultez l’article sur les mudra internes pour plus de détails). Elle est utilisée dans le Nada Yoga pour développer la perception des sons psychiques.

Chandra Bedhana

Cette technique est l’opposée de celle de Surya Bedhana, exposée plus haut.

Elle n’est pas détaillée dans les textes classiques car considérée comme risquée. En effet elle peut entraîner ou aggraver de manière importante des états dépressifs et léthargiques. A ce titre elle ne devrait pas être pratiquée seul mais accompagné d’un enseignant expérimenté.

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La variante où l’expiration se fait par la narine droite est une technique plus avancée de Svara Yoga, qui s’attache à équilibrer le souffle entre les narines.

Shitali et Shitkari

Ces deux techniques sont rafraîchissantes et à utiliser lorsque le climat est chaud. Elles agissent aussi bien au niveau du corps que du mental. Toutes les deux utilisent des inspirations par la bouche en faisant passer l’air sur la langue  dont l’humidité rafraîchit l’air à l’entrée.

La différence entre les deux techniques réside dans la position de la langue pour rafraîchir l’air inspiré.

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Shitkari
Source : livre « Prana and Pranayama » de Swami Niranjanananda Saraswati

Pour Shitali, tirez la langue et enroulez là de manière à lui donner la forme d’un tube, pressez légèrement sur la langue avec les dents pour la maintenir en place. Aspirez l’air lentement et profondément via la langue comme avec une paille.

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Pour Shitkari, ouvrez légèrement la bouche, détendez la mâchoire inférieure et laissez la langue suspendue derrière les dents. Aspirez l’air  lentement et profondément via l’espace entre les dents en produisant un sifflement.

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Krishnamacharya et sa lignée pratiquent les variantes suivantes :

  • expiration en Ujjayi ;
  • alternance de l’expiration entre les narines sans Ujjayi (un cycle contient donc deux inspirations par la bouche).

Murcha

Murcha qui signifie évanouissement est une technique avancée de Pranayama et doit être encadrée par un enseignant expérimenté.

Son objectif est de s’approcher de l’état d’évanouissement, de provoquer un état conscient d’inconscience. Pour ce faire des mouvements de la tête sont associés à des rétentions à poumons pleins et différents mudra.

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Nous voici au terme de ce panorama des principales techniques de Pranayama. Il existe d’autres techniques et surtout de nombreuses variantes permettant d’adapter la pratique à chacun et de progresser par étapes et sur la durée.

Forts de ces connaissances sur le Pranayama, composante majeur du Yoga, nous pourrons aborder dans le prochain et dernier article de cette série les modalités de leur mise en pratique.

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